Ouragan De Laurent Gaudé
RésuméA La Nouvelle-Orléans, alors qu'une terrible tempête est annoncée, la plupart des habitants fuient la ville. Ceux qui n'ont pu partir devront subir la fureur du ciel. Rendue à sa violence primordiale, la nature se déchaîne et confronte chacun à sa vérité intime : que reste-t-il en effet d'un homme au milieu du chaos, quand tout repère social ou moral s'est dissous dans la peur ? Seul dans sa voiture, Keanu fonce vers les quartiers dévastés, au cœur de la tourmente, en quête de Rose, qu'il a laissée derrière lui six ans plus tôt et qu'il doit retrouver pour, peut-être, donner un sens à son existence... Dans un saisissant décor d'apocalypse, Laurent Gaudé met en scène une dizaine de personnages qui se croisent ou se rencontrent. Leurs voix montent collectivement en un ample choral qui résonne comme le cri de la ville abandonnée à son sort. Roman ambitieux à l'écriture empathique et incantatoire, Ouragan mêle la gravité de la tragédie à la douceur bienfaisante de la fable pour exalter la fidélité, la fraternité, et l'émouvante beauté de ceux qui restent debout.
Mon avisJe n’avais encore jamais rien lu de cet auteur jusqu’ici, ce qui m’a attiré ici, c’est La Nouvelle-Orléans d’abord, et puis, j’étais curieuse de voir quelle histoire pouvait sortir de cette catastrophe et des évènements honteux qui l’ont accompagnés.
Je n’ai vraiment pas été déçue par cette lecture, et je vais très certainement découvrir les autres œuvres de l’auteur dès que je le pourrais !
Ce livre aurait pu être une œuvre de science-fiction, on y découvre une ville (La Nouvelle-Orléans) dont les habitants sont dans l’attente, dans l’angoisse, puis cette même ville, dévastée après le passage de l’ouragan (Katrina). Les difficultés que rencontrent les survivants dans cet endroit où il n’y a plus aucune loi que celle du plus fort et où les rues sont partagés entre les prisonniers évadés de prison et les fous qui profitent de l’occasion pour laisser libre court à leurs envies de faire couler le sang.
Seulement voilà, même si c’est un roman peuplé de personnages fictifs, on sait tous que tout cela a vraiment eus lieu, et ça n’en rend le récit que plus intense et touchant.
Les personnages sont tous très bons, on passe des uns aux autres (sans jamais s’y perdre d’ailleurs, en un mot ou deux, l’auteur nous permet tout de suite de savoir avec qui on est), il y a les durs, les fous, les fragiles, les détruits, ils sont –presque- tous aussi attachants. Malgré un grand nombre de personnages et peu de pages, on en sait beaucoup sur chacun et on a vite la sensation de les connaître, presque intimement, tellement ce qu’ils ressentent nous est intensément transmis.
J’ai particulièrement aimé cette vielle noire de 100 ans qui se lève chaque matin à l’aube pour s’asseoir à l’avant du bus des blancs, parce que, comme elle le dit, elle veut à la fin de sa vie pouvoir mourir en sachant qu’elle a passé plus de temps à l’avant du bus, la tête haute, qu’à l’arrière, bafouée et humiliée. Son humour, sa philosophie, sa façon de continuer son petit bonhomme de chemin bien droit devant elle, de poursuivre son but coute que coute même quand tout s’écroule autour d’elle est très touchant.
Ces personnages pourraient avoir toutes les couleurs (pour certains, on ne sait d’ailleurs pas s’ils sont noirs ou blancs), l’important est ce qu’ils vivent et surtout, ce que cet ouragan va leur faire à eux, dans leur propre vie, et pas seulement matériellement, mais tout ce que parfois, il leur apporte aussi. Le changement, l’espoir, la liberté, le retour à la réalité.
Mais ce que pointe l’auteur aussi, c’est que ceux qui sont restés, ceux qu’on a laissé sur place, abandonnés à leur sort, ce sont les pauvres, les noirs pour la plupart (ou les prisonniers, ceux qui valent moins que les chiens qui eux ont été évacués…), ceux dont ont ne voulait déjà pas avant et depuis toujours… ça en dit long sur notre société et sur cette région des États-Unis…
Le style de l’auteur est très agréable à lire, on passe sans arrêt (les chapitres sont souvent assez court) d’un personnage à un autre, et pourtant, le récit reste totalement fluide, il le fait de telle façon que ce n’est pas du tout gênant, et le fait de voir le déroulement de plusieurs points de vus le rend encore plus intéressant. Il nous conte ces vies blessés avec beaucoup de tendresse, voir même de poésie parfois. Il nous fait connaître ces personnes jusqu’au plus profond de leur âme, et ceux qui aurait pu de l’extérieur donner l’impression de n’avoir aucun intérêt, deviennent ces personnes touchantes que l’on a envie de voir vivre.
Vous l’aurez compris, j’ai beaucoup aimé ce livre, l’histoire de ces hommes et de ces femmes est parfois drôle (par l’ironie de certains personnages), souvent émouvante (mais jamais larmoyante), difficile, et toujours captivante et très forte. Le savant mélange de réalité et de fiction donne au livre une puissance parfaite.
Seul regret : il est presque trop court (188 pages) tellement on s’y sent bien !
Je vous recommande chaudement cette lecture !
PS: J'aime beaucoup la couverture aussi!!