Je me suis rendu compte que pas mal de personnes passent à côté de quelques subtilités de mon texte. Aussi, je voulais vous laisser interpréter mon texte comme vous le pensiez mais on m'a dit que mes réponses aux questions étaient la bienvenue pour mieux discerner mon histoire. J'ai donc écrit une analyse de ma nouvelle en expliquant aussi son évolution.
________________________________________________________________________________________________________
Évolution et analyse du texteAu débutMa première idée du texte est assez différente de la version finale.
Au début, le Connaisseur était un extra-terrestre qui était venu sur la Terre mais il ne faisait tout simplement rien. Il restait assis, les yeux fermés, sans parler. J'ai par la suite abandonné cette idée car j'ai imaginé la chute qui est que le Connaisseur c'est moi et tout ce qu'elle implique (explication plus tard).
Le titre était aussi différent. A la base, elle devait se nommer "Le prêtre, le scientifique, le philosophe et le salaud de Connaisseur". Le but était d'aborder ces trois thèmes qui sont Dieu, l'univers et la vie. Chaque personne aurait eu droit à questionner le Connaisseur pendant cinq minutes sur leur domaine. Le principe des questions-réponses restaient toutefois la même : le Connaisseur "évitait" ou comprenait d'un autre sens les questions ce qui énervait les "experts". J’ai finalement laissé tomber l'apparition du prêtre parce que c’est un sujet délicat ainsi que du scientifique car je n’avais pas beaucoup d'imagination pour trouver un double sens aux questions de l'univers.
Le titreDu coup, je voulais aussi changer le titre de la nouvelle. Je ne souhaitais pas le laisser à "Le philosophe et le salaud de Connaisseur". Le titre original était plus subtil car en lisant les premiers mots "Le prêtre, le scientifique, le philosophe", on pouvait s’attendre à un niveau de lecture évolué et riche en réflexion. Puis, les derniers mots "et le salaud de Connaisseur" fait totalement rabaisser ce qu’on avait imaginé auparavant. Le mot "salaud" ne nous laisse pas vraiment présager à une histoire sérieuse. Vu le texte très court, je ne voulais pas non plus révéler dès le début que le Connaisseur n’était pas si sage qu’on pouvait le penser au début.
J’ai donc adopté pour titre un jeu de mot "L’a vie du Connaisseur" car je parle de
l’avis du Connaisseur en ce qui concerne
la vie. Aussi, puisque les questions que pose le philosophe peuvent être comprises d’un autre sens, ce titre est idéal : le texte parle-t-il de l’avis du Connaisseur ou de la vie du Connaisseur ?
Le style d’écritureJ'ai posté la deuxième partie au jour et à l'heure exacte de cette annonce (donc jeudi "prochain" à 16h) car je voulais tenter une approche en "direct". Et qui dit direct dit le présent et c’est pour cela que j’utilise ce temps là dans mon texte.
Si je n'ai pas beaucoup approfondi les personnes et qu'il n'y a pas réellement le point de vue d'un personnage, c'est parce que la scène et la conversation sont vues par vous, lecteurs, comme si vous regardez vraiment la télévision ! C'est pour ça que j’emploie des termes du genre "M. Brükner semble..." ou "on fait signe au philosophe" plutôt que "le philosophe voit qu'on lui fait signe".
A l’origine, écrire au présent n’était pas prévu. Contrairement à la version finale, je voulais justement écrire de façon "ordinaire" et donc au passé simple et à l’imparfait. Je devais même décrire très précisément chaque événement. Puisque le but était de vous immerger dans l’histoire de manière à avoir la sensation de suivre un entretien à la télévision, il aurait été normal que je m’attarde plus sur les descriptions, en particulier sur le visuel. Mais, voilà, j’ai rencontré deux soucis à ce style d’écriture. Le premier problème est qu’on se concentrerait trop sur les images qui sont la plupart du temps pas importantes pour la suite et la compréhension de l’histoire. Et comme le sujet est centré sur la conversation, les descriptions casseraient le rythme. Le deuxième ennui et que, dans ce cas, je devrais décrire le Connaisseur, c’est-à-dire moi. D’une part je n’aime pas cet exercice là mais, aussi, dire que le Connaisseur est un jeune homme
, beau, sexy, ça briserait l’imagination des lecteurs d’un vieux sage et la chute aurait été moins puissante. Je voulais aussi laisser une bonne part du mystère autour du personnage. J’ai donc décidé d’écrire un texte très simple qui dit l’essentiel de la situation et le comportement des personnages
De plus, je peux trouver une autre bonne raison à ces phrases et ces descriptions si courtes dans la version finale : le rythme est le même que si nous regardons la télévision. Les dialogues s’enchaînent plus ou moins rapidement et on ne va pas perdre du temps à décrire ce que l’on voit. Du coup, je reste fidèle à mon idée de base qui consiste à suivre l’histoire à travers la télévision mais en prenant plus d’importances sur d’autres points que le visuel.
L’entretienParlons tout d'abord de cette introduction sous une forme d’annonce télévisée. Le but était de vous intriguez, de vous faire croire que le sujet était sérieux et que j'allais vraiment vous révéler (d'après mes pensées) les secrets de la vie.
Peu à peu, vous pouvez vous rendre compte que le Connaisseur ne répond pas aux attentes du philosophe (et de vous, lecteurs). En effet, à première vue, il répond ce qu’il comprend.
Je n’ai pas vraiment voulu montrer quelque chose à travers ces questions qu’on peut interpréter de deux manières différentes. Pour ma part, c’était avant tout une sortie de secours et de trouver un moyen pour que le Connaisseur s’échappe aux questions tout en répondant juste. On pourrait traduire cet événement par "il faut toujours réfléchir avant d’agir / de parler" mais ce n’est pas tout à fait vrai puisque M. Brükner se casse la tête pour trouver de bonnes questions.
En tout cas, le philosophe semble donc croire que le Connaisseur ne saisit pas bien ses questions. Vous, vous pouvez penser autre chose…
La chuteJe vous ai tout d’abord intrigué avec le personnage à travers l’introduction. Après, j’ai laissé un moment en pause sur le mystère autour du Connaisseur pour se concentrer sur la conversation. A ce moment là, vous pouvez déjà avoir des doutes sur ses compétences : soit c’est un rigolo, soit c’est un imposteur, soit il ne comprend pas les vraies questions de M. Brükner et donc qu’il est un peu bête.
Puis vient la première chute, celle où vous n’avez pas la réponse à la dernière question. Cette question que vous vous êtes posée dès le début. Qui est le Connaisseur ? C’est une fin frustrante. Surtout qu’après cette phrase, il y a un moment de silence pour montrer l’importance à cette question. Et cette chute : "le temps est écoulé". Si vous étiez bien distrait par la conversation, vous avez sans doute oublié ce détail qu’il n’y avait que trois minutes d’entretien et, pourtant, je l’ai souligné au prologue et juste avant la discussion.
Et, enfin, il y a la seconde chute. L’avantage d’une "double chute" est que la deuxième est toujours inattendue puisqu’on croit que l’histoire se finit par la première. Cependant, dans un texte, il est facile d’apercevoir la fin et c’est pour ça que j’ai mis un grand espace entre la première et la seconde chute : pour pas que vous puissiez deviner cette "double chute". Et quelle chute ! Le Connaisseur, c'est moi ! Et pourtant, au fond, vous le savez. C'est moi qui aie écrit cette histoire, c'est moi qui fais répondre le Connaisseur et ce sont donc mes réponses à moi. Et aussi, je vous ai eu. Le Connaisseur (donc moi) n'a jamais détenu les secrets de la vie. Je vous ai fait croire que je les savais alors que vous (ou plutôt les téléspectateurs de ma fiction) attendez avec impatience que je vous les révèle.
Les derniers mots "je t’emmerde" est là pour casser ce rythme, cette ambiance et l'idée qu'on a du caractère du Connaisseur (qu’on a tout d’abord cru être un sage). C'est aussi pour bien confirmer les propos que j'ai dit précédemment "Je m'appelle Yao" et que c'est donc bien moi qui parle au philosophe (ou à vous, lecteurs).
Le Connaisseur est donc un imposteur mais pas un personnage de fiction. C’est moi, c’est mon comportement mais dans un contexte inventé.
L’inspirationMême si je n'ai jamais lu / vu, je pense que H2G2 m'a un peu inspiré. Je sais seulement la petite histoire de "La grande question sur la vie, l'univers et le reste". Dans ce livre, les humains ne savent pas quelle est réellement la question qu’ils ont posée mais ils ont la réponse. Dans mon texte, M. Brükner ne sait pas comment formuler ses questions mais il a toujours une réponse "vraie".
Cependant ce qui m'a surtout inspiré, c'est ma dernière lecture : "Le voyage à Ixtlan - les leçons de Don Juan" (autobiographie). Carlos Castaneda, un apprenti pose souvent des questions à son maître Don Juan (un sorcier yaqui). Le problème, ce sont les réponses. Je cite (on est à moment important de l'apprentissage) :
- Carlos Castaneda a écrit:
- - Tu vas apprendre à ne-pas-faire. Il est préférable que nous parlions puisque avec toi il n'y a pas d'autres moyens d'agir. J'ai cru que tu arriverais à ne-pas-faire sans que j'aie à intervenir. Je me trompais.
- Don Juan, j'ignore de quoi vous parlez.
- Ça n'a aucune importance. Je vais t'entretenir de quelque chose de très simple mais de très difficile à accomplir. Je vais te parler de ne-pas-faire bien qu'il n'y ait aucun moyen d'en parler parce que c'est le corps qui fait cela.
[...]
Il regarda autour de lui et désigna un gros rocher.
- Ce rocher, là-bas, est un rocher du faire.
Nous nous regardâmes. Il eut un sourire. J'attendis une explication, mais il resta silencieux. Alors je lui avouai que je n'avais rien compris.
Voilà, ce sont ces conversations qui m'ont inspiré : questions d'un apprenti (M. Brükner) et les réponses d'un maître (le Connaisseur). L'apprenti est "frustré" (dans le livre c'est pas trop le cas) parce que le maître ne répond pas comme il le souhaite.